En l’absence d’Ulysse, parti pour la guerre de Troie, l’éducation de son fils Télémaque est confiée à un de ses amis dénommé Mentor. Ce vieil homme jouera le rôle de précepteur et de conseiller de confiance pour le jeune Télémaque. Aujourd’hui le mot « mentor » est utilisé comme nom commun pour désigner, dans son acceptation la plus sommaire, une personne qui partage son expérience, ses connaissances, avec quelqu’un de plus novice. De façon informelle, le transfert d’expérience et de connaissance se pratique tous les jours, dans nos universités, nos administrations et nos entreprises. Mais ce que l’on désigne le plus souvent par « mentoring » correspond en réalité à un programme formel, mis en place par une organisation dans le but de développer la carrière, le réseau ou les connaissances d’une personne, souvent désigné par le terme « mentee » ou « protégé ». Dans son principe, il est parfois assimilé au coaching, parfois distinct ou considéré comme une catégorie générale au sein de laquelle s’inscrivent d’autres pratiques telles le coaching, le tutorat ou encore le parrainage. D’un point de vue académique, les définitions suivantes permettent de mieux appréhender le rôle du mentor et l’objet de la relation de mentoring. “A Cette définition pose deux fondamentaux du mentoring: le partage d’expérience et la relation de confiance. “To help and support people to manage their own learning in order to maximise their potential, develop their skills, improve their performance, and become the person they want to be.” Eric Parsloe, “Coaching, Mentoring and Assessing: A practical guide to developing competence”, 1992 On retiendra ici que le mentoring agit comme catalyseur du développement personnel. Ainsi le mentoring n’a pas pour objet d’apporter des réponses toutes faites au mentee, mais au contraire de l’aider à développer ses propres ressources et solutions pour faire face aux problèmes auxquels il peut être confronté. Le mentoring vise à aider le mentee à devenir « la personne qu’il souhaite être » et non à créer des clones. “A mentor is that person who achieves a one to one developmental relationship with a learner; and one whom the learner identifies as having enabled personal growth to take place” Christine Bennetts, “Mentors, Mirrors and reflective Practitioners; an inquiry into informal mentor/learner relationships”, 1994 Il ne s’agit pas d’une transmission à sens unique, mais d’une relation, privilégiée et personnelle, entre un mentor et un mentee, dont l’objet est à nouveau le développement personnel. “Mentoring is a process in which (…) the Cette dernière définition souligne le fait que si le mentoring permet au mentee de mieux se réaliser dans son rôle actuel, il sert également des objectifs à long terme. Ceci est cohérent avec l’idée de développement personnel qui, par essence, requiert du temps. David Clutterbuck[1] distingue la conception nord américaine du mentoring et celle d’autres régions telle l’Europe, l’Australie, l’Afrique du Sud. L’approche nord américaine serait fondée sur une relation unilatérale de transfert de savoir allant du mentor à son protégé. C’est le mentor qui dirige cette relation, le protégé ayant un rôle passif. La seconde approche serait fondée sur une relation mutuelle de développement personnel entre mentor et mentee, dans laquelle le mentee tient un rôle actif, la finalité étant de rendre le mentee capable de développer ses propres ressources et solutions. Nous proposons ici de retenir que le mentoring consiste en une relation privilégiée et personnelle entre un mentor, généralement une personne plus expérimentée, et un mentee. L’objectif de cette relation est de permettre au mentee de mieux se situer dans son rôle actuel et de favoriser son développement personnel à long terme. Le mentor, en s’appuyant sur sa propre expérience et sur ses connaissances, met en perspective le savoir, les compétences, les idées et le comportement du mentee. Ce que le mentoring n’est pas : - une formation : le mentor n’apporte pas de solutions, mais une mise en perspective des interrogations du mentee, - du clonage : l’objectif est le développement personnel du mentee, pas la perpétuation d’un modèle, - du favoritisme : le développement du mentee doit dépendre uniquement de son évolution dans son rôle et dans l’organisation et non de l’appui d’une personne plus expérimentée, - du management : le type de relation ouverte, ayant un focus sur le développement à long terme et sur la réalisation personnelle du mentee qu’implique le concept de mentoring semble difficile à concilier avec un rôle hiérarchique qui juge la performance, attend des résultats et donc arbitre en quelque sorte les décisions prises par le mentee. Dans un prochain article, nous nous pencherons sur les questions pratiques liées à la mise en place d’un programme formel de mentoring. Nicolas Mundschau est issu de la promotion 2001/2002 du Master de Management International des Ressources Humaines de l’Université d’Angers. Après avoir occupé un poste de Responsable de la Mobilité Internationale et du Droit Social en France, il participe actuellement à un programme de développement de carrière de deux ans, entre la France et l’Allemagne. Il est également intervenant professionnel dans le cadre du Master 2 MIRH.
[1] David Clutterbuck, Gill Lane, “The Situational